La difficile quête d’un PIB vert
&
Le spectre des actifs échoués
Par Philippe PLASSART
« La courbe d’expérience aidant »
D’un naturel plutôt pondéré et discret, j’ai mis ces traits de caractère pour embrasser, la courbe d’expérience aidant, le journalisme en me mettant à l’écoute des autres. J’ai été amené, à mes débuts, à traiter et commenter des statistiques économiques et sociales pour le quotidien spécialisé Liaisons sociales. Une école de rigueur. Je rejoins ensuite le nouvel Economiste en tant que responsable du suivi de la conjoncture, du commerce extérieur et de la « macro-économie », étendant par la suite mes domaines à l’international, le politique et le social.
Co - corédacteur en chef au nouvel Economiste depuis 2005, je pratique un journalisme « d’analyse » c’est-à-dire de décryptage des enjeux et des problématiques qu’ils soient économiques, politiques ou sociétaux, l’article proposé à ce concours sur les actifs échoués en étant une bonne illustration. Je réalise aussi régulièrement des entretiens avec des personnalités capables d’éclairer nos lecteurs sur notre monde si changeant
Parallèlement, je m’investis dans l’AJEF –association des journalistes économiques et financiers. Au sein de cette association, je me suis occupé plus spécifiquement de l’organisation des « Ateliers de Bercy » qui permettent aux journalistes d’approfondir certains sujets complexes de politique économique avec des hauts fonctionnaires du ministère de l’Economie. Je participe aussi à la préparation de conférences « de haut niveau » à l’Institut de France en partenariat avec Sociétal, le média de l’Institut de l’Entreprise.
Extrait de « Le retour aux fondamentaux du journalisme » par Philippe PLASSART (cliquez sur le titre pour accéder à l’article)
Jamais peut-être le métier d’informer n’a été mis autant sur la sellette. Et les conditions de son exercice si difficiles. Une crise sans précédent qui touche à l’essence même de la fonction du journaliste : rechercher l’information, la vérifier, la hiérarchiser pour enfin l’interpréter. Un savoir-faire exclusif dont il a perdu, à tort ou à raison, le monopole aux yeux du public. Ce dernier se détourne des médias “officiels” au profit d’autres canaux qui, tels les réseaux sociaux, imposent leurs règles et leur rythme dans le débat public.
Si le journaliste n’est désormais plus considéré comme le messager unique de la nouvelle, il reste toujours sûrement en mesure de faire la différence par la qualité de l’interprétation qu’il donne aux événements – pour peu que celle-ci soit logique et cohérente et qu’il ait pris soin au préalable, impératif incontournable, d’en vérifier la véracité, une démarche indispensable à l’heure de la prolifération des fake news. Sur ce plan, les vertus du raisonnement par l’écrit restent incomparables. Pour le métier de journaliste, c’est donc plutôt un retour aux fondamentaux qui s’impose qu’une réinvention complète des règles de l’art. Ce qui veut dire aussi que tout le monde ne peut s’improviser journaliste ou en revendiquer le titre. Une façon de réhabiliter le “bois” dont est fait ce professionnel, dont la nervure principale est assurément l’indépendance d’esprit.
Journaliste analyste
Le métier de journaliste peut-il retrouver ses galons de crédibilité ? Assurément oui. Il lui faut pour cela renouer avec sa raison d’être fondamentale : l’explication de texte de l’actualité. C’est-à-dire miser sur la qualité de l’analyse. Une voie à la fois évidente et exigeante. Évidente ? La complexité du monde, l’entrelacs des tenants et aboutissants, le jeu souterrain des interdépendances n’a jamais rendu en effet autant nécessaire le décryptage des faits, la mise au jour de leur importance et l’évaluation de leurs conséquences. Exigeante ? Le journaliste ne peut plus se contenter de poser la sacro-sainte question professionnelle, celle du “quoi de neuf”, il doit faire l’effort d’aller jusqu’à l’interprétation. Dans cette démarche d’approfondissement, le journaliste est en mesure de faire la différence. Par rapport à l’universitaire ou l’expert, il est bien mieux outillé du fait de son savoir-faire pour rendre simple ce qui est complexe et rendre intéressant ce qui est important. Par rapport aux messages orientés des communicants, la réflexion journalistique, faite de mise à distance et d’esprit critique, apparaît bien plus libre. Idem par rapport à la parole des politiques dont la finalité est d’être intrinsèquement au service exclusif et intéressé de la conquête puis de la préservation du pouvoir.
Pour déployer sa valeur ajoutée, le journalisme dispose d’une arme redoutablement efficace : le maniement des mots dans leur syntaxe. Un savoir-faire qui donne toujours, même dans notre monde saturé d’images, une prime à l’écrit. En enchaînant des mots portant des concepts, l’écrit sollicite l’hémisphère gauche de notre cerveau, celui qui déclenche la réflexion par le raisonnement séquentiel. À l’inverse de l’image qui, en jouant sur l’instantané et l’émotion, active la partie droite du cerveau. Le mot ouvre la réflexion, l’image la tue, résume la science cognitive. Preuve que l’écrit n’a pas dit son dernier mot : on voit de plus en plus souvent sur les écrans des chaînes d’info en continu des mots en incrustation, comme s’il s’agissait de mieux faire imprimer le message… Autre vertu de l’analyse écrite : sa durabilité. Le décryptage d’un enjeu ou d’une problématique a une durée de vie plus longue que la simple information factuelle du qui, quand, quoi, comment. Et grâce désormais à Internet qui permet un accès immédiat à la ressource des articles quelle que soit sa date de fabrication, tout à chacun dispose d’une mine documentaire incommensurable. Qui a dit que l’écrit était mort ?
Pour autant, tout le monde ne peut pas s’improviser journaliste analyste. Savoir écrire est une condition nécessaire mais pas suffisante ; il faut être aussi capable de raisonner, de mettre en relation les causalités, de distinguer l’essentiel de l’accessoire, de se méfier des apparences souvent trompeuses. Une aptitude qui requiert une solide culture générale pour se hisser rapidement à la hauteur des événements. Un profil de normalien en somme, mais un normalien qui aurait le caractère et l’assurance pour pouvoir réfléchir par lui-même à l’abri des sectarismes, des idéologies ou des modes. Devant être sans a priori, un bon journaliste ne peut avoir que des a posteriori. Il doit donc se méfier de ses préjugés, accepter la critique, faire droit à la contradiction… Et si on attend d’un bon article qu’il défend une thèse, il doit le faire sans mauvaise foi et par une argumentation honnête, déontologie professionnelle oblige.