DÉBAT N°4
Les États-Nations sont-ils menacés d’implosion ? Quelles conséquences pour la France et l’Europe ?
Animé par Michèle Cotta, éditorialiste, essayiste, avec :
Dominique Reynié, professeur des universités à Sciences Po, directeur général de la Fondation pour l’innovation politique ; Manuel Valls, député (apparenté LaREM) de la 1ère circonscription de l’Essonne, ancien Premier Ministre
Les Républicains et, plus encore, le Parti socialiste sont sortis lessivés de la séquence électorale de 2017 qui a vu l’accession au pouvoir d’Emmanuel Macron et l’installation à l’Assemblée nationale d’une majorité de députés d’En Marche. Le grand parti de toutes les droites républicaines rebaptisé par Nicolas Sarkozy et le parti dominant de la gauche française fondé par François Mitterrand au congrès d’Epinay en 1971 ont vu leurs candidats éliminés, en avril, du second tour de la présidentielle. Puis, dans la foulée, ils ont fondu comme neige au soleil lors des législatives de juin. Pour autant, ils n’ont pas totalement disparu de la scène politique. Ils disposent encore tous les deux d’un solide réseau d’élus locaux. Ils n’ont pas renoncé à se reconstruire sur de nouvelles bases avec de nouveaux dirigeants. Reste que la question de leur survie ou, pour le moins, de leur capacité à retrouver une place centrale dans le jeu politique français reste évidemment posée.
Qu’ont-ils payé au prix fort, l’année dernière ? Leur usure, leur impuissance face à la crise qui a sévit durant deux quinquennats, leur incapacité à renouveler leur logiciel idéologique ? C’est probable. Mais au-delà, n’est-ce pas aussi un mode d’organisation, autrement dit une manière de concevoir l’engagement et l’action politique, qui a été rejeté par une majorité de Français ? En 2017, de curieux mouvements ont arraché le pouvoir à ceux qui s’en croyaient les détenteurs légitimes. En Marche s’identifie à Emmanuel Macron jusque dans ses initiales et les Insoumis n’existent pour l’instant que pour et par Jean-Luc Mélenchon. Ce sont des organisations hypercentralisées dans leur mode de direction, faiblement démocratiques et dotées d’un logiciel idéologique livré d’en haut et clé en main. Mais en même temps, ce sont des mouvements ouverts à de nouvelles formes de militantisme, fonctionnant volontiers en réseaux, adaptés pour cela à des modes de communication propres aux réseaux sociaux.
Mieux tenus que les partis du « vieux monde » en ce sens que chez eux, on ne fronde pas, mais aussi mieux connectés aux multiples réalités de la société françaises, ils inventent, chacun à leur façon, l’un au pouvoir et l’autre dans une opposition radicale, un militantisme d’un nouveau genre, moins centré sur les jeux d’appareil et moins refermé sur le monde clos des sections ou des notables locaux. Neufs, ils le sont à coup sûr. Vraiment nouveaux, ça se discute. Faits entièrement pour la conquête du pouvoir, le sont-ils aussi pour son exercice ? C’est toute la question.