François cornut-gentille
Savoir pour pouvoir
Gallimard
François Cornut-Gentille est député de la Haute-Marne, une terre qui a fortement subi les
aléas économiques des quarante dernières années. Elu RPR puis UMP puis LR depuis 1993, il
est avant tout un gaulliste social, l’héritier de Philippe Séguin et le plus fidèle à son mentor.
Son expérience et son travail de terrain l’ont amené à la problématique de ce livre
époustouflant d’intelligence. Son propos est de comprendre comment le pouvoir a perdu la
force de gouverner, de tenter de comprendre les raisons de l’impuissance publique et de
chercher les voies d’en sortir.
Après avoir analysé avec finesse les raisons de cette impuissance publique notamment en se
basant sur son travail de fourmi en Seine-Saint-Denis, il en vient à prôner le recours
permanent au diagnostic. Un diagnostic qui, à l’image de son travail dans le 93, permettrait à
la fois d’associer toutes les parties prenantes et tous les partis politiques pour aboutir à un
consensus sur l’état des problèmes et des priorités à résoudre. Ce n‘est qu’une fois ce
diagnostic établi qu’il sera alors possible d’apporter des solutions et des remèdes aux
dysfonctionnements que l’on peut rencontrer dans nos sociétés. Comme il le dit « c’est faute
de diagnostic que nous ne comprenons plus le monde qui nous entoure et que nous ne
savons plus où nous en sommes ». Les partis sont devenus des « marques » qui ne
connaissent que les rapports de force et affirment une radicalité qui leur évite d’accepter
des compromis, synonymes à leurs yeux de compromission voire de trahison. De fait, le
travail de diagnostic n’existe pas dans les partis ; on propose avant de comprendre, on se
positionne avant d’analyser.
Les décisions sont devenues inintelligibles car les politiques restent démunis des clés qui leur
permettraient de comprendre ce qui arrive au pays. L’auteur propose la création d’un
« Conseil de la République » qui pourrait être chargé de cette mission de diagnostic et se
substituerait au CESE dont l’utilité échappe aujourd’hui à chacun. Ce conseil serait une
assemblée véritablement nationale dont la vocation serait de représenter les Français, c’est-
à-dire d’exprimer leurs préoccupations. A charge, une fois le diagnostic d’une situation ou
d’un problème réalisée, à l’Assemblée nationale d’apporter et voter les solutions tandis que
le Sénat les adapterait aux spécificités des territoires.
Même si l’auteur ne se berce pas d’illusions sur le courage et la capacité des gouvernants de
mettre en place cette révolution institutionnelle, il fait la démonstration que des solutions
existent pour remédier au mieux aux problèmes actuels et réhabiliter la politique. A fortiori,
il nous éclaire sur le fonctionnement actuel des institutions et sur les voies qu’il faudrait
emprunter. Et si François Cornut-Gentille est depuis si longtemps plébiscité par ses
électeurs, il le doit à sa réflexion et son action et peut s’épargner la course aux plateaux
télévisés et débats inutiles dont raffolent ses collègues. La réflexion paie toujours mieux que
l’agitation.
Philippe Méchet