Chapitre 4 : Issy et l’économie, les entreprises

Luce Perrot : André Santini, qu’est-ce que l’économie des villes de demain pour vous ?

André Santini :Il est vrai que l’image compte beaucoup. Nous avons accueilli le siège européen de Microsoft (45 000 m²), le siège de Capgemini (ils sont 215 000), le siège français de ServiceNow. Le siège mondial d’Orange est en train de se faire, bientôt celui de Nestlé.

CapGemini avait le choix entre La Défense, Paris et Issy-les-Moulineaux. La Défense, c’est introuvable : ils doivent améliorer leur signalétique. On se perd entre toutes ces tours. Paris, ils n’en veulent plus. Issy-les-Moulineaux, ils ne connaissaient pas bien mais ils nous ont choisis. Pourquoi ? Parce que CapGemini est une entreprise nomade, ils vont chez leurs clients et ils ont découvert qu’autour d’Issy-les-Moulineaux étaient installées les entreprises qui les intéressaient.

ServiceNow est originaire de Santa Clara en Californie et compte 10 000 employés à travers le monde. Il s’agit de l’une des entreprises les plus dynamiques aux Etats-Unis : 70% des membres du CAC40 sont ses clients. Ils ont choisi Issy-les-Moulineaux : d’abord en y installant 150 salariés, puis bientôt 500.

Eutelsat, qui gère 40 satellites s’installe définitivement d’ici juillet. Je leur ai dit : « Ce qui m’intéresse, c’est que vous me donniez l’accès aux enfants de mes écoles », ce qu’ils ont accepté. Les gosses vont dialoguer avec les satellites, c’est formidable. A chaque fois, on associe la modernité et l’économie (500 emplois).

Chez ServiceNow, le président n’a accepté d’être présent à l’inauguration de leur nouveau siège qu’à la condition que j’y vienne également. Il a déclaré : « Nous sommes dans une ville formidable, avec des entreprises formidables autour de nous, la ville est très accueillante. Le maire est très drôle, c’est la raison pour laquelle je vais être très bref afin qu’il puisse parler ».

Ils ont félicité la jeune femme qui a réalisé tous ces travaux qui, en me raccompagnant, me dit qu’elle est croate. Elle me confie : « Monsieur Santini, j’habite votre ville. J’habite les beaux quartiers des bords de Seine. Je suis très contente pour les enfants. Je ne voudrais pas habiter ailleurs ». Le lendemain, j’expliquais à mes collaborateurs que lorsqu’une société américaine de pointe vient chez nous et en est heureuse et que celle qui a réalisé cette implantation a choisi d’habiter notre ville, c’est peut-être que nous avons coché les bonnes cases. C’est ce qu’il faut comprendre et expliquer.

Comment, aujourd’hui, note-t-on l’évolution d’une ville et son succès ? Pour Issy-les-Moulineaux, c’est simple : 70 000 habitants, 70 000 emplois et 15 000 à venir, des sièges sociaux magnifiques construits par de grands architectes… C’est cette politique d’investissements à long terme qui paie aujourd’hui.

Les grandes mégapoles comme Singapour utilisent les services de Dassault System par exemple, pourquoi ne les utilise-t-on pas en France ?

Il y a un très bel exemple : Morpho, une filiale de Safran. Le général Abrial arrive chez Safran et j’apprends qu’ils vont se dessaisir de Morpho. Il m’explique que Morpho ne représente qu’un tout petit chiffre d’affaires pour Safran et qu’il n’en voit pas l’intérêt. Les Allemands l’ont acheté, les Américains l’ont acheté. En France, ils ont décidé « cela ne nous intéresse pas, il y a des problèmes éthiques ». Et maintenant, nous commençons à peine avec Nice.